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Santé sans frontière: les citoyens de l’Eurodistrict s’interrogent

Santé sans frontière: les citoyens de l’Eurodistrict s’interrogent

« La mobilité des patients n’est plus un phénomène marginal en Europe mais est devenue un acte de la vie courante.

L’objectif de la conférence sera donc de formuler des propositions concrètes pour que l’Eurodistrict devienne une région pilote dans le domaine de la santé transfrontalière. Cette journée vise à donner la parole aux citoyens et à solliciter les acteurs politiques, les professionnels de la santé, les organismes d’assurance maladie pour apporter des réponses aux préoccupations des citoyens. »

Les organisateurs

9h15– Introduction de M. Roland Ries, Maire de Strasbourg, Président de l’Eurodistrict Strasbourg-Ortenau.

M.Ries présente le nouveau cadre juridique de l’Eurodistrict (Communauté Urbaine de Strasbourg, l’Ortenaukreis, ainsi que les cinq grandes villes d’Offenburg, Lahr, Kehl, Achern et Oberkirch.): nouvelles structures décisionnelles et opérationnelles au sein d’un Groupement Européen de Coopération Territoriale (GECT), création d’un secrétariat commun à Kehl, et abandon du principe de l’unanimité pour statuer à la majorité simple des suffrages exprimés au Conseil de l’Eurodistrict.

Objectifs: créer un territoire européen pilote, faire disparaître la frontière, faire tomber les barrières administratives et, ce faisant, faciliter la vie au quotidien (transports, environnement, santé, sports, économie, culture…), développer la coopération transfrontalière existante.

 

Il a été décidé que le développement de l’Eurodistrict se ferait en y associant étroitement les citoyennes et les citoyens du territoire par le biais d’une concertation publique menée à plusieurs niveaux.

9h25 : Intervention de Wolfgang Müller, Maire de Lahr, à propos de la coopération transfrontalière.

9h35 Quel programme européen en matière de mobilité des patients ? Etat des lieux de la directive sur les droits des patients.

Le point de vue du parlement européen : Mme Françoise Grossetête, Députée européenne, Rapporteur du Parlement sur la directive santé.

Cette directive répond à un déficit législatif, elle a notamment trois objectifs principaux:

• préciser la façon dont les patients peuvent exercer leurs droits à des soins de santé transfrontaliers• garantir la qualité et la sécurité des soins transfrontaliers (meilleurs délais…)• contribuer à la coopération entre les systèmes nationaux de santé pour effectuer des économies d’échelle.

Mme Grossetête est chargée de la 2è lecture de cette directive, la première lecture ayant eu lieu en Avril 2009. Cette directive ne devrait toutefois pas être applicable avant 2010-2011.

En matière de mobilité des patients, Mme Grossetête fait remarquer qu’il faut lutter contre le tourisme médical.

Elle note aussi qu’il reste des incertitudes quant aux remboursements, à la détermination du pays, au choix du prestataire par les patients.

Cette directive confirme cependant le droit des citoyens européens à recevoir des soins de santé ambulatoires (ex: dentaires, opticien ou chez un généraliste) dans un autre Etat membre sans autorisation préalable de leur caisse. En ce qui concerne les soins hospitaliers , c’est une notion qui devra être définie par les Etats membres (en principe cela concerne des soins nécessitant au moins une nuitée dans un hôpital ou une clinique), nécessité d’une autorisation.

Reconnaissance mutuelle des prescriptions venant d’un Etat membre

 

10h: à la suite des questions posées par le public, Mme Grossetête mentionne la mise en place d’un réseau de points de contacts nationaux d’information et d’un médiateur européen pour les patients visant à renforcer la confiance des patients dans le marché européen de la santé, en leur apportant une aide concrète, des informations avant la prise de décision de se faire soigner à l’étranger et une assistance en cas de litige avec une caisse d’assurance maladie ou un prestataire de soins.

Remarques :

  • · Mme M. Mérigeau estime que cette directive constitue en fait un retour en arrière en accordant aux Etats plus d’autonomie pour refuser des soins.
  • · M. Tiriou demande qu’il y ait une définition commune précise de la notion d’actes ambulatoires et de « soins hospitaliers » et que les états ne se retranchent pas derrière les exclusions pour justifier des refus de remboursements (ex: une journée d’hospitalisation sans nuitée ? Opération de la cataracte ?…À clarifier)

10h15 : deux exemples de zones frontalières pilotes

Ø L’exemple de l’EUREGIO Kai Michelsen, Maastricht University (Belgique/Allemagne/Pays-Bas)

Cf. Document: « patient mobility in the European Union » www.euregio-mr.org/emr_site/index

Das Projet Euregio: 2004-2007- Les régions frontalières ne sont pas un phénomène marginal.

Cf. carte des régions frontalières en Europe.

Ø L’exemple franco-belge : Cornelia Federkeil-Giroux (Mutualité française/Observatoire franco-belge de la santé)

Cet observatoire créé en 1999 est un GEIE (Groupement européen d’intérêt économique)

Son but est d’analyser et définir les besoins de l’offre de soins dans la proximité des citoyens.

Mise en place d’actions très concrètes : exemple de la dialyse (coopération entre la ville de Mouscron en Belgique et Tourcoing: 40 patients français sont traités en Belgique 3 fois par semaine).

Il existe une convention d’aide médicale urgente pour toute la frontière franco-belge.

Il faut à présent réfléchir :

– au bassin de soins transfrontaliers

– à la création de filières de soins

 

L’exposé est intéressant, assez technique et prouve que dans certaines régions frontalières, il y a davantage d’initiatives et de volonté pour faire avancer les choses.

10h45 : questions du public

Pause café

11h10c oopération transfrontalière : réalisations et projets

Ø Coopération des services de secours : Dr Jean-Claude Bartier, Responsable médical du Samu 67

Selon lui, nous cumulons, dans ce domaine, des obstacles mais aussi des facteurs favorisants :

– Les ponts (8)

– Le poids du passé : y a-t-il un besoin de coopération après 50 ans d’ignorance du voisin ?

– La barrière de la langue pour les formations spécialisées

– le passage à l’euro facilite la comparaison des coûts

– Coopétition : coopération + compétition : tarification (système privé en Allemagne/ public en France)

– Crédits de formation

Depuis 2007, les véhicules d’urgence allemands peuvent circuler de manière prioritaire dans le Bas-Rhin.

Ø Projet de coopération transfrontalière en matière d’épilepsieProf. Bernhard Steinhoff, Directeur du Centre d’Epilepsie de Kork

Le SEEK (Strasbourg Epileptologie Eurodistrict Kork) : projet sur 3 ans du 01.01.2009 au 31.12.2011

Le centre de Kork est une clinique privée. Un atout : il dispose de l’équipement permettant le vidéo EEG (Electro-Encéphalogramme Vidéo)

Ø Coopération médicale Ortenau Klinikum /Hôpitaux Universitaires de Strasbourg :

 

le Dr Franz Hahn(Ortenau Klinikum Offenburg) nous présente le « Perinatal Zentrum Ortenau Klinikum ». Il fait état d’un nouveau projet, un accord cadre permettant une coopération entre l’Etat français et le Land du Bad-Württemberg.

11h50 : fin des exposés

Puis interventions de M. Marc Boisnel du Ministère de la santé et des sports et de M. Alexandre Feltz

 

Buffet

13h30 : visionnement du court- métrage sous-titré « Témoignages de patients / Praticiens »

Réalisation de Richard Nicolini , journaliste indépendant.

13h50 : application effective des droits des patients dans l’Eurodistrict : parole aux citoyens!

 

Ø Introduction par Alain Lamassoure, Député européen, Président d’Euro-Info-Consommateurs

M. Lamassoure explique la différence entre un règlement et une directive: si un règlement est voté, il est applicable sur le champ. En revanche, une directive qui est un texte cadre ne peut être validée que si une loi est votée qui permette de l’appliquer. Il faut compter en général 2 ans.

M. Lamassoure expose le cas (qui remonte à 2005) de Mme Watts, une citoyenne britannique assez âgée, souffrant d’une arthrose de la hanche. On lui dit qu’elle doit être opérée au plus vite (pour une prothèse), c’est-à-dire dans 6 mois. Comme elle souffre beaucoup et ne veut pas attendre si longtemps, elle va consulter en France: on peut l’opérer dans les 48h !

Mme Watts retourne en Angleterre, et informe son médecin. Sa hiérarchie réagit et lui propose de l’opérer dans 3 mois !

Mme Watts décide de se faire opérer en France, puis envoie la facture au National Health Service qui refuse de la rembourser. Obstinée, Mme Watts saisit la cour européenne de justice qui lui donne raison.

Mais il reste des problèmes non résolus.

Exemple: la compensation financière est à mettre à l’ordre du jour. C’est une question importante : comment, par exemple, payer les frais d’opération d’une prise en charge d’un petit roumain opéré en France ?

 

Ø Les problèmes concrets rencontrés par les patients français et allemands:

intervention de Mme Merigeau, Directrice Générale d’Euro-Info-Consommateurs.

Mme Merigeau note que 27% de la population européenne est en zone frontière. Ce n’est donc pas une problématique marginale.

Ces problèmes sont connus depuis longtemps, des solutions ont été proposées mais il y a peu d’avancées concrètes.

Voir les projets soutenus par Intereg alors que le projet santé initié par Euro-Info-Consommateurs a été rejeté par la commission d’attribution d’Intereg.

Ø Témoignage de Jean-Louis Becker qui travaille en Allemagne, vit en France et qui, victime d’un infarctus, a connu toutes sortes de tracasseries administratives.

 

Ø Intervention de Mme Monique Schneider, Présidente de l’Association de citoyennes et citoyens en région frontalière qui présente les difficultés pratiques rencontrées par les citoyens français résidant en Allemagne.

Ø Le point de vue des caisses d’assurance maladie : CPAM et AOK

§ Exposé de M. Joseph Losson, Directeur de la CPAM du Bas-Rhin :

La prise en charge des soins ambulatoires est acquise. Il n’en va pas de même pour les soins hospitaliers qui nécessitent une entente préalable sauf soins urgents.

Il faut respecter l’égalité de traitement qu’on se fasse soigner en France ou en Allemagne.

M. Losson souligne que le niveau de rémunération des médecins des 2 côtés est différent, donc tarification non identique.

 

M. Losson, s’est contenté de rappeler les « règles du jeu », c’est-à-dire les conditions de prises en charge et de remboursements en général. Il n’a pas répondu aux questions ni pris en compte les critiques à l’égard de la CPAM. Son discours visait plutôt à dénoncer ceux qui veulent réclamer des « passe-droits, des traitements de faveur (remboursements plus importants que pour les patients en France!). Donc une réponse culpabilisante à l’égard des patients et éludant les vraies questions.

 

§ Exposé de M. Michael Bächle, AOK Südl.Oberrhein , responsable du Service Relation Assurés

M. Bächle présente la position de l’AOK par rapport aux autorisations, évoque la netc@rd etc.

Son exposé est clair et neutre.

 

v Le point de vue des Etats

§ Exposé de M. Marc Boisnel, Représentant du Ministère de la Santé et des Sports

M. Boisnel reprend les propos de Mme Grossetête sur la directive et les arcanes de sa mise en œuvre.

 

§ Exposé de M. Laurent Habert, Directeur Général de l’Agence Régionale de la santé Alsace (l’ARS)

En matière de coopération transfrontalière nous disposons :

– D’un accord-cadre franco-allemand de 2005 sur le domaine de la coopération.

– De la Conférence du Rhin Supérieur

Cette coopération est importante mais est marginale en terme de quantité.

Pour développer la coopération transfrontalière :

– Coopération par le patient lui-même qui choisit où se faire soigner

– Echanges communs entre les professionnels de santé

– Les régulateurs

 

Pause-café

 

16H Table ronde introduite par le Dr Feltz : « se faire soigner plus facilement dans le pays voisin : les praticiens de l’Eurodistrict ouvrent le débat »

 

Cette table ronde a permis principalement à différents médecins d’apporter leurs témoignages et leurs points de vue : explications et prises de positions intéressantes et concrètes avec un retour aux vraies questions.

 

§ Dr Francis Ferrari, Ophtalmologue à Strasbourg, mentionne l’opération de la cataracte. Dans les faits, la mobilité ne fonctionne pas.

Qu’est-ce qu’un acte ambulatoire? Il faut définir ce terme. En Allemagne, c’est lorsqu’il n’y a pas de nuitée. Pour la France, une hospitalisation c’est aussi bien une hospitalisation de jour que de nuit.

 

§ Témoignage d’une participante dont l’enfant est épileptique.

En Alsace, il n’y a pas de structure d’accueil pour les enfants épileptiques. Donc ceux-ci sont dirigés vers Kork. Cependant une prise en charge médico-éducative n’est pas possible à Kork car il n’existe pas de cadre légal, on n’oriente pas l’enfant scolairement mais il reste à l’hôpital. Les parents doivent donc avancer les frais de type IME (les instituts médico-éducatifs sont des établissements spécialisés qui accueillent les enfants et adolescents atteints de déficience intellectuelle)

 

M. Jean –Pierre Haertel de l’ARS reconnaît la nécessité de créer une association pour qu’une prise en charge médico-éducative pour les enfants orientés à Kork soit effective et légale.

 

· Dr. Christian Michel, Médecin Généraliste à Strasbourg

· Dr. Claude Bronner, Médecin Généraliste à Strasbourg

· Dr. Stephan Hambrecht, Médecin Chef pour la médecine interne, Ortenau Klinikum Kehl

· Dr. V. Augustin, Médecin à Strasbourg

· Dr. Hans-Jürgen Vogel, Médecin spécialiste pour la médecine interne, Ortenau Klinikum Kehl

· Dr. Gilbert Luttenschlager, Chirurgien Dentiste à Kehl et à Strasbourg

· Dr. Thomas Weiss, Neurologue à Kehl

Ces médecins soulignent :

– le manque de bonne volonté des caisses de maladie pour aborder le problème de la nomenclature des actes qui pourrait être facilement réglé,

– les difficultés qui résident davantage dans les tracasseries administratives que dans les problèmes d’accès aux soins

– la nécessité de mutualiser davantage de part et d’autre du Rhin

– le fait que tout le monde est d’accord sur le principe des soins frontaliers mais qu’il manque une organisation pour aider les patients français.

16h50 conclusion par Jacques Bigot, Président de la Communauté Urbaine de Strasbourg

À retenir de son intervention, le projet de « conseil consultatif du citoyen ». Il est en effet question de la création de cette instance de discussion depuis que l’Eurodistrict a acquis un nouveau statut juridique.

 

Notre conclusion: la conférence a été certes utile et a permis des mises au point intéressantes, mais de nombreuses questions restent posées, notamment :– la question d’une nomenclature commune pour les actes médicaux.– la question des délais de remboursements raisonnables et de la transparence.– le manque d’interlocuteurs, notamment au niveau de la Sécurité sociale, en mesure de fournir des réponses précises et justes. – la nécessité de créer un poste de médiateur pour aider à la résolution des difficultés.

 

L’Eurodistrict, région-pilote dans le domaine des soins transfrontaliers ? Nous attendons de véritables initiatives, à l’exemple de ce qui se passe dans d’autres régions frontalières.

 

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